«En me rendant au Sahara, j'ai éprouvé un sentiment très mystique et très profond. J'ai beaucoup aimé cette région où j'ai trouvé ma voie d'essayiste avec une saveur poétique car elle est très riche en culture orale», affirme Lucy Melbourne.
A travers ses visites de plusieurs villes et régions du Maroc, Mme Melbourne s'imprègne de la culture marocaine qu'elle trouve très riche aussi bien sur le plan patrimonial, architectural que religieux. Elle la décrit dans son essai aussi fidèlement et sentimentalement que possible mettant même en exergue les cinq appels à la prière et l'effet qu'ils produisent sur elles.
«Durant toute la journée, ce que j'aime le plus au sujet de l'appel à la prière c'est sa qualité symphonique. Les mosquées ne sont pas synchronisées, et donc un muezzin commence et un autre le suit et puis un troisième s'y joint, tous en écho, s'adaptant quelque peu au jeu entre le conscient et l'inconscient». Un son qui lui rappelle sa propre enfance au Moyen-Orient. «A l'entendre de nouveau, c'est comme un retour chez moi».
Cet ouvrage constitue une belle lecture pour les Marocains, faisant ressortir dans un style simple toute une tranche de vie d'une société où les contradictions entre authenticité et modernisme ne manquent pas de flotter à la surface, menant aux débats quotidiens des civilisations Orient-Occident. Une réalité qui ne fait que stimuler l'auteur pour apprendre la darija marocaine et les diverses musiques du pays pour mieux s'infiltrer dans les secrets de ce pays.
«La femme marocaine est aussi diverse que sa culture »
Interview • Lucy Lauretta Melbourne, écrivaine
Quel a été l'objectif de votre résidence au Maroc ?
J'ai passé deux années au Maroc en tant qu'enseignante d'Anglais et de Sciences humaines aux Universités Ibn Tofail et Mohammed V de Rabat. En même temps, j'ai essayé d'étudier la voix féminine dans l'écriture marocaine. Ironiquement, j'y ai trouvé ma propre voie. Une voix qui s'élève en éliminant tous les stéréotypes. Ma première démarche a été, donc, de mieux connaître ce pays, à travers ses traditions, sa cuisine, ses habits, puis petit à petit je suis entrée dans le vécu quotidien de la population. J'ai été fascinée par la diversité de la culture et de la civilisation marocaine. Ce qui m'a frappé le plus est la complexité de cette culture que les Américains ne connaissent pas.
Quelle est l'impression que vous donne la femme marocaine ?
La femme marocaine est aussi diverse que sa culture. Donc, nous pouvons voir aussi bien des femmes avec le hijab que d'autres en jeans. Un foisonnement de cultures se trouve mêlé dans ce pays. Cela est peut-être dû à sa situation géographique. Quant à leur comportement, je les trouve fortes avec beaucoup de pouvoir. Rien à voir avec les stéréotypes cultivés par l'Occident décrivant ces femmes comme des opprimées. Donc, j'ai essayé d'exprimer ceci dans mes écrits en utilisant beaucoup d'humour et j'ai essayé de donner ma culture par la fenêtre du Maroc. Mais, ce qui me désole et que je reproche aux Marocains c'est de laisser leur belle culture si vivante et si riche pour aller vers d'autres. Moi, je pense que les Marocains doivent conserver précieusement cette culture au lieu d'imiter les autres.
Vous n'avez jamais ressenti un quelconque rejet au Maroc ?
Si, de temps en temps, mais il ne faut pas généraliser. Il faut dire que j'ai été reçue avec chaleur par beaucoup de gens. Moi personnellement, j'ai beaucoup de sympathie pour les Marocains.
Le Matin