Le code de la famille marocain est une source d'inspiration pour le monde arabo-musulman et même pour le monde occidental, a souligné jeudi lors d'une conférence à Washington, Rajaâ Naji El-Mekkaoui, professeur de l'enseignement supérieur et chercheur en droit privé, qui a été la première femme à présenter devant SM le Roi Mohammed VI une causerie religieuse pendant le mois sacré du ramadan, en 2003.
Elle a noté que ce nouveau texte est révolutionnaire à bien des égards et notamment en ce qui concerne la consécration des droits de l'enfant.
S'adressant à un parterre de chercheurs, professeurs et étudiants lors de cette conférence tenue au Centre des Etudes arabes contemporaines de l'université Georgetown, Mme El-Mekkaoui a indiqué que ce code, considéré comme Œ'un modèle extraordinaire'' par le monde arabo-musulman et par le monde en développement, en général, a été accueilli favorablement en Occident et a même eu un impact sur ce genre de législations dans certains pays.

A la lecture de l’article 78 du code de la famille qui a donné une nouvelle définition du divorce, on ne peut s’empêcher d’avoir l’impression du déjà vu. Les rédacteurs du code de la famille ont certes, adopté une nouvelle approche, mais dans le fond, l’homme et la femme ne sont pas considérés sur un pied d’égalité face au divorce. Pour la dissolution du mariage, la recherche de l’équilibre prend le pas sur le principe de l’égalité. D’où l’hésitation des rédacteurs du code de la famille entre la pérennité de tous les modes de dissolution du mariage, notamment, la répudiation pour l’homme. Pour la femme, les rédacteurs du code de la famille ont repris, le divorce judiciaire avec ses différents motifs, même ceux qui n’ont jamais été portés devant les tribunaux, comme le divorce pour abandon du lit, le khol’ et le tamlik. Mais le code innove en raison de l’orientation générale de la réforme dont l’objectif est la levée des injustices à l’égard de la femme.
Pour concilier entre pérennité et renouveau, les rédacteurs du code de la famille ont dû reprendre tout le chapitre sur la dissolution du mariage, commençant par la définition du divorce, en passant par des restrictions du droit du mari à la répudiation, l’assouplissement du droit de la femme au divorce, réglementant le khol’ et le tamlik, introduisant enfin d’autres modes de dissolutions de l’union conjugale.
Le code de la famille institue de nouveaux rapports entre les père et mère et entre ces derniers et leurs enfants aussi bien pendant le mariage qu’après sa dissolution.
Consécration de la place de la mère pendant le mariage comme après sa dissolution
La première règle importante, qui change les rapports entre les père et mère à propos de leurs enfants, est celle prévue par l’article 51 qui fait de “La concertation en matière de décisions relatives à la gestion des affaires familiales, des enfants et de planning familial” une obligation commune des époux. En application de cette règle, le juge ne donne l’autorisation pour le mariage du mineur qu’après avoir “entendu les deux parents” (article 20 du code de la famille). Cette règle est valable même si les parents sont divorcés.
Pendant le mariage, comme après le divorce, la tutelle légale sur l’enfant appartient au père. Cette prérogative revient à la mère qui peut l’exercer même pendant le mariage en cas d’absence du père ou de son incapacité juridique (article 231 du code de la famille).
Ce nouveau texte suscite cependant des interrogations :
L’épouse tenue de prendre “en charge… avec son époux… la responsabilité de la gestion des affaires du foyer familial et des enfants” (alinéa 3 de l’article 51 du code de la famille), est-elle obligée d’avoir un travail rémunéré pour faire face à ses nouvelles obligations ?
En fait, la nouvelle règle est beaucoup plus une reconnaissance de la prise en charge par l’épouse avec son mari de la responsabilité familiale, que ce soit par son salaire ou par son travail domestique, qu’une obligation à son égard.
Aussi, cette nouvelle règle n’est pas une porte ouverte aux maris qui, sous prétexte de chômage forcé ou provoqué, vont penser qu’ils ont désormais le droit de se décharger sur leurs épouses pour assumer seules les charges de ménage. Cette remarque nous amène à soulever une autre interrogation.
Le mari est-il toujours tenu d’entretenir femme et enfants ?
Les textes du nouveau code de la famille répondent clairement par l’affirmative à cette question (les articles 195 et 197).
Les rapports propres aux époux
On peut dire sans hésitation, qu’en matière de rapports entre époux, le code de la famille fait sa révolution contre l’esprit qui régnait dans l’ancienne moudawana. Celle-ci ne considérait pas les époux comme partenaires. Car la relation du mariage ne produisait pas pour eux les mêmes effets. Avec les textes auparavant applicables, le mariage avait, certes, certains effets communs, mais à côté, les droits de l’un des époux étaient des obligations de l’autre, aucun devoir mutuel d’entraide et d’assistance (la femme avait automatiquement le droit de demander le divorce pour indigence du mari, même si elle avait une fortune personnelle). Aussi, par le mariage, la femme engageait sa personne (obligations de fidélité, devoir d’obéissance, respect des parents du mari…) alors que le mari engageait ses finances (devoir d’égalité entre les épouses en cas de polygamie, devoir d’entretien…).
Pour les conditions de fond du mariage, les parties sont tenues au respect de leur loi nationale. Avec toutefois un allégement pour l’une des conditions, qui risque de poser problème devant l’officier d’état civil étranger, à savoir la dot. Le silence de l’acte de mariage sur la dot ne doit pas conduire à sa nullité. Ce qui est exigé, c’est que l’acte de mariage ne doit pas contenir une renonciation de la femme à sa dot.
Les conditions de reconnaissance de l’acte civil établi à l’étranger par les autorités marocaines sont fixées par l’article 15 du code de la famille :
- Les intéressés sont tenus de l’enregistrer, dans un délai de trois mois, auprès de l’autorité consulaire marocaine du lieu où l’acte est établi.
- A défaut d’autorité consulaire, une copie doit être envoyée au Ministère des Affaires Etrangères.
Le mariage est porté en marge de l’acte de naissance de l’intéressé
Pour les mariages, une copie est envoyée à l’officier d’état civil du lieu de la naissance des époux. A défaut de naissance au Maroc, c’est au procureur du Roi auprès du tribunal de première instance de Rabat que la copie de l’acte de mariage est envoyée.
Pour l’établissement de l’acte de mariage des Marocains résidant à l’étranger, le code de la famille consacre pour la première fois la règle “locus regis actum”, usitée en droit international privé, qui signifie “la soumission de l’acte juridique, quant à la forme, à la loi du lieu où il a été passé”.
“Les Marocains résidant à l’étranger peuvent conclure leur mariage en conformité avec les procédures administratives locales, pourvu que soient réunies les conditions du consentement et de l’aptitude et qu’il n’y ait pas d’empêchements légaux et pas de renonciation à la dot “sadaq” ; et en présence de deux témoins musulmans et du “wali” si c’est nécessaire” (article 14 du code de la famille).
Par conséquent, le nouveau code de la famille admet pour la première fois la forme civile du mariage. Il dispense les Marocains établis à l’étranger de procéder à l’établissement de l’acte adoulaire, soit au consulat du Maroc du lieu de leur résidence, ou au Maroc pour ceux qui résident dans un pays où le Maroc ne dispose pas de représentation diplomatique.
Le mariage est conclu au Maroc : il sera dorénavant difficile de dissimuler son état de personne mariée (article 65 du code de la famille)
Désormais, pour tout acte de mariage, un dossier est constitué et déposé auprès du tribunal de famille du lieu de la célébration du mariage. Il est paraphé par le juge de la famille chargé du mariage après vérification des documents constituant ledit dossier. Après quoi, il doit être classé avec un numéro d’ordre auprès du secrétariat du greffe.
Le juge autorise les adouls à consigner le mariage. Les adouls doivent porter sur l’acte de mariage les déclarations de chacun des deux fiancés attestant s’ils ont été déjà mariés ou non. Dans l’affirmative, leurs déclarations doivent être accompagnées “de documents justifiant la situation légale à l’égard de l’acte à accomplir” (article 65 du code de la famille).
L’acte de mariage est consigné dans un registre auprès du tribunal de la famille (article 68 du code de la famille)
La fraude est sanctionnée pénalement. A la demande de la personne lésée, les dispositions de l’article 366 du Code pénal seront applicables à l’encontre de toute personne, et de ses complices, qui recourt à la fraude pour obtenir l’autorisation du mariage ou le certificat d’aptitude (article 66 du code de la famille).
Le mariage est célébré à l’étranger : vers la reconnaissance de la forme civile du mariage
mardi, 01 novembre 2005 02:25

La polygamie?

 la polygamie n’est autorisée selon l’article 42 du code de la famille que si :
1- l’épouse n’a pas exigé la renonciation à la polygamie.
2- La demande d’autorisation est adressée au tribunal en mentionnant les motifs la justifiant et en joignant une déclaration relative à la situation du demandeur et à ses obligations financières.
Le mari dépasse ces exigences et obtient l’autorisation de polygamie, quels sont les droits de la première et de la deuxième femme ?
Les droits de la première épouse
Pour une meilleure jouissance, par la femme, de cette clause de monogamie, sa banalisation dans la pratique est nécessaire. Aussi, pour lever le tabou qui plane sur les clauses à inclure dans le contrat de mariage, que les familles trouvent “hchouma” d’invoquer, il serait recommandé d’ajouter une disposition au nouveau code de la famille qui fait de l’information des futurs époux de leurs droits et devoirs, au moment de la conclusion du mariage, une obligation des adouls.
Ensuite, la polygamie n’est pas autorisée, par le tribunal :
1- si sa justification objective et exceptionnelle n’est pas établie.
2- si le mari ne dispose pas suffisamment de ressources pour entretenir les deux familles et garantir tous les droits, dont la pension alimentaire, le logement et l’égalité dans tous les aspects de la vie (41 du code de la famille).
Désormais, il ne suffit plus d’avoir les moyens financiers pour avoir l’autorisation de polygamie, il faut avoir une justification objective et exceptionnelle.
Dans l’article 41 du projet, l’autorisation était refusée “si la nécessité n’en est pas prouvée”. Or, il est apparu, lors du débat parlementaire, que la nécessité est une notion qui prête à l’interprétation. Elle est subjective, donc susceptible d’être liée beaucoup plus aux désirs du demandeur de l’autorisation, sans autre considération
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