Pas moins de quarante membres, provenant de différents horizons
professionnels, siègeront pour un mandat de quatre ans au sein de cette
instance présidée par un économiste (ingénieur Ponts et Chaussées),
ancien détenu politique, en l'occurrence Abdesselam Aboudrar. M.
Aboudrar, qui a été nommé à ce poste le 20 août dernier par SM le Roi
Mohammed VI, sait que, durant son mandat de six ans à la tête de cette
instance, sa mission ne sera surtout pas une partie de plaisir. Lui qui
est censé connaître mieux que quiconque son ennemi, celui de tous les
Marocains, le cas échéant la corruption, aura mesuré l'ampleur de ce
que l'on attend de lui. «Améliorer le classement du Maroc en matière de
lutte contre la corruption est le défi à relever», dit-il à ALM. Il
s'agit, pour lui et pour son équipe de travail de manière générale,
d'œuvrer de sorte que le pays dépasse la note de 3,5/10 et atteindre,
donc, une position plus honorable. Pour ce faire, il a mis sur pied un
plan d'action dont il donne la primeur à ALM. «L'Instance aura la tâche
de réaliser des études sur la corruption au Maroc, actualiser la base
de données sur ce phénomène et définir des stratégies de communication
et des campagnes de sensibilisation», dévoile-t-il. Ces mesures
sont-elles suffisantes pour enrayer le mal de la corruption? Quelles
attributions possède l'Instance pour mettre en œuvre sa stratégie? Les
conclusions de l'Instance sont-elles contraignantes? Ou sont-elles
uniquement consultatives? Contrairement à ce que plusieurs pensent, le
rôle de l'Instance va au-delà de la simple consultation. «Notre
Instance peut proposer des lois en matière de lutte contre la
corruption. Nous pouvons, également, présenter des propositions pour
améliorer l'arsenal juridique et assurer l'effectivité des textes de
loi déjà adoptés», révèle M. Aboudrar. Gare, donc, à celui qui croit
que l'Instance en question ferait fonction seulement de chambre
d'enregistrement des doléances faites ici ou là.
Une simple plainte déposée par un citoyen, ou une institution, si elle
s'avère fondée, peut finir devant les tribunaux. «S'il s'avère qu'il
s'agit bel et bien d'une violation de la loi, nous pouvons demander la
saisine de la justice», avertit M. Aboudrar, sur le ton de la fermeté.
Une fermeté salvatrice pour un pays décidé, aujourd'hui plus que tout
autre temps, à gagner la bataille de la transparence. L'initiative de
SM le Roi, instigateur de cette formidable idée, traduit bel et bien la
volonté hautement politique d'enrayer un fléau qui a écorné pendant
longtemps l'image du pays.
L'installation de l'Instance centrale pour la prévention de la
corruption, - et au-delà de ce que peuvent dire les autres -, dénote
d'abord et surtout la conscience d'une nation que tout effort de
développement serait vain en dehors d'une lutte sans merci contre le
fléau de la corruption. «Nous allons faire tout ce qui est en notre
pouvoir pour changer cette situation», a promis M. Aboudrar, à la
veille de l'installation des membres de l'Instance.
Une sorte de «parlement» réunissant, de manière équilibrée, des
représentants des départements ministériels, des représentants
d'associations professionnelles, de fédérations et de syndicats, et des
représentants d'ONG sans compter des universitaires. «La stratégie que
nous allons suivre sera le fruit de la collaboration de tous les
membres de l'Instance», annonce M. Aboudrar. Au-delà des membres de
cete Instance, la société, toute la société, est concernée par ce
combat pour la transparence.
Aujourdui le Maroc